Retraite d’ayahuasca : déroulement, effets et expériences à découvrir

En 2019, le ministère de la Santé péruvien a publié une résolution administrative qui reconnaît officiellement l’usage rituel de l’ayahuasca. Pourtant, en France et ailleurs en Europe, la DMT qu’elle contient figure toujours sur la liste des stupéfiants. Les médecins alertent sur les dangers d’interactions avec certains traitements, tandis que les chercheurs soulignent l’absence de recul sur les conséquences à long terme.

Chaque année, des milliers de personnes franchissent pourtant le pas : ils participent à des retraites autour de l’ayahuasca, attirés par un mélange d’espoir et de curiosité, alors même que la légalité de ces pratiques demeure incertaine. Certains en sortent transformés, d’autres témoignent de troubles persistants, physiques ou psychiques, parfois lourds à porter.

L’ayahuasca : origines, croyances et place dans les traditions chamaniques

Dans la forêt amazonienne, tout commence par la rencontre de deux plantes : la banisteriopsis caapi, une liane puissante, et les feuilles de psychotria viridis. Ce duo forme le socle de l’ayahuasca, boisson rituelle qui traverse les siècles et les territoires. Les peuples autochtones la préparent selon des savoirs transmis de génération en génération. Pour eux, il ne s’agit pas d’une simple décoction, mais d’un remède, d’une passerelle entre les mondes. Les chamans y voient un outil pour soigner, guider, initier. Les anthropologues, eux, y lisent la trace d’une pharmacopée complexe, où se nouent science et spiritualité.

La clé du mélange, c’est l’alchimie entre la liane, riche en inhibiteurs de la monoamine oxydase (IMAO), et la DMT apportée par la psychotria viridis. C’est cette combinaison qui rend la substance psychoactive active par voie orale, ouvrant la porte à des états de conscience singuliers.

L’ayahuasca s’inscrit dans la médecine traditionnelle bien au-delà des visions. Les rituels structurent la vie collective, renforcent les liens, transmettent une cosmogonie où chaque plante, chaque chant, chaque geste a sa raison d’être. Le chaman, figure centrale, guide les participants dans un dialogue avec “les esprits des plantes”, selon la formule consacrée.

Pour mieux comprendre les composants du breuvage, voici les éléments clés :

  • Banisteriopsis caapi : la liane, véritable colonne vertébrale de la préparation
  • Psychotria viridis (chacruna) : les feuilles qui renferment la DMT

Longtemps restreints à la sphère amazonienne, ces savoirs circulent aujourd’hui au-delà des frontières. Leur diffusion interroge les rapports occidentaux aux plantes médicinales sacrées. Un rituel ayahuasca ne se limite pas à la prise d’une substance : il s’inscrit dans un tout, où pharmacologie et cosmologie, rationalité et croyance, se mêlent. Ce carrefour façonne une expérience qui ne ressemble à aucune autre.

À quoi ressemble une retraite d’ayahuasca ? Immersion dans le déroulement d’un rituel

Le décor, c’est souvent la lisière de la forêt amazonienne, un centre de retraite à l’écart du tumulte, ou même la jungle péruvienne. Les participants arrivent en petits groupes, chacun avec ses doutes, ses attentes, parfois ses blessures à panser. Ils sont accueillis par le chaman ou le maître de cérémonie. Avant la première cérémonie ayahuasca, le silence s’impose. La plupart ont observé une diete stricte : peu de sel, presque pas de sucre, parfois abstinence sexuelle. Rien n’est laissé au hasard. La sobriété des lieux contraste avec la promesse d’un voyage intérieur intense.

Quand la nuit tombe, le rituel démarre. Les chants icaros résonnent dans la pénombre, accompagnant les participants. Le breuvage, épais et amer, circule lentement. Chacun boit sous l’œil attentif du chaman. Ici, l’improvisation n’a pas sa place.

Le cours de la cérémonie suit une séquence immuable :

  • Ouverture avec l’invocation des esprits des plantes sacrées
  • Ingestion du breuvage
  • Alternance de chants, tambours et moments de silence
  • Accompagnement personnalisé pour les participants submergés par l’intensité du breuvage

Les effets ne tardent pas : certains vivent une tempête sensorielle, d’autres se retrouvent face à des souvenirs enfouis. Quelques-uns éprouvent le sentiment de retrouver une harmonie oubliée. L’aube finit par percer, ramenant chacun à la réalité, marqué par la traversée. Les regards échangés témoignent d’une expérience qui, si elle fut partagée collectivement, reste unique pour chaque participant.

Quels effets physiques et psychiques attendre d’une expérience ayahuasca ?

L’ayahuasca, ce duo de banisteriopsis caapi et de psychotria viridis, frappe fort dès les premières minutes. Les réactions du corps sont immédiates : nausées, vomissements, parfois diarrhée. Dans le cadre du rituel, ces manifestations sont interprétées comme une purge : le corps se libère, l’esprit se nettoie. On transpire, la température varie, le cœur s’emballe. Le corps encaisse, puis cède à l’action du breuvage.

Côté psychique, la DMT bouleverse la perception : le temps se distend, la conscience se fragmente. Des visions jaillissent, motifs, souvenirs, figures symboliques, parfois même des visages disparus. Les émotions affluent sans retenue : peur, joie, parfois un lâcher-prise radical, parfois une rude confrontation avec soi-même.

Voici ce que rapportent le plus souvent les participants :

  • Disparition momentanée du sentiment d’identité
  • Impression d’avoir vécu plusieurs vies en une nuit
  • Sentiment de connexion profonde à la nature ou à une histoire collective

Certains évoquent la remontée de souvenirs douloureux, d’autres parlent d’un accès à une forme de réparation intérieure. Des équipes médicales explorent l’utilisation de l’ayahuasca pour accompagner le traitement des troubles psychologiques, notamment le stress post-traumatique. Quoi qu’il en soit, aucune expérience ne ressemble à une autre : l’ayahuasca bouleverse, secoue, transforme parfois durablement la manière de se percevoir et d’être au monde.

Groupe de personnes en pleine discussion en forêt

Entre bienfaits, risques et recommandations : ce qu’il faut savoir avant de se lancer

Nombreux sont ceux qui cherchent dans l’ayahuasca un outil de développement personnel ou d’exploration de la conscience. Les récits abondent sur les bénéfices ressentis : meilleure connaissance de soi, apaisement des angoisses, résolution de nœuds anciens. Mais il serait illusoire d’ignorer le revers de la médaille. Le breuvage peut provoquer des réactions difficiles, tant sur le plan psychique que physique.

Les risques les plus fréquemment rapportés sont les suivants :

  • Episodes prolongés d’anxiété ou de confusion
  • Interactions sévères avec des médicaments, notamment les antidépresseurs
  • Manifestation de troubles psychiatriques sous-jacents jusque-là latents

Le cadre légal de l’ayahuasca demeure flou en Europe, et en particulier en France, où la DMT est considérée comme stupéfiant. À l’opposé, certains pays d’Amérique du Sud, tel le Pérou, offrent à la médecine traditionnelle un statut reconnu et une protection juridique réelle.

Avant toute démarche, une consultation médicale s’impose. Renseignez-vous sur la compétence du chaman ou du maître de cérémonie : la qualité de l’accompagnement, la connaissance du rituel et la gestion des situations critiques sont des facteurs décisifs pour la sécurité. Mieux vaut choisir des structures qui proposent un suivi post-expérience, où l’intégration occupe une place réelle. Préparation et vigilance ne sont jamais accessoires sur ce chemin.

À la sortie d’une retraite ayahuasca, il reste souvent plus de questions que de certitudes, et parfois, cette incertitude vaut tous les voyages.